Retour

DAPA: Long-term outcome of the Defibrillator After Primary Angioplasty: Les patients à « haut risque » pourraient-ils bénéficier de l’implantation précoce d’un défibrillateur à la phase aiguë d’un infarctus du myocarde ?

Un « Gap » en matière de données :

Le bénéfice de l’implantation prophylactique en prévention primaire d’un DAI après la phase aiguë d’un infarctus du myocarde (IDM) a été largement établi par l’essai MADIT 2 il y a près de deux décennies. Cette étude a néanmoins exclue les patients ayant eu un IDM datant moins d’un mois auparavant ou ayant subi une revascularisation lors des 3 premiers mois post IDM.

Les essais qui ont suivi à savoir IRIS et DYNAMIT ont quant eux étudié l’intérêt de l’implantation précoce d’un DAI dans les 40 jours suivant l’IDM, mais n’ont malheureusement démontré aucun bénéfice. Il est à noter tout de même qu’IRIS a dénoté une réduction de la mort subite dans les mois suivant la randomisation chez les patients implantés précocement, bénéfice «neutralisé» par une augmentation des décès cardiaques tout-venu.

En conséquence, les recommandations Européennes actuelles stipulent de reporter l’implantation d’un DAI d’au moins 6 semaines en post infarctus, et celles Américaines de 40 jours, voire de 3 mois en cas de revascularisation. Toutefois, Il est à souligner que le moment et le succès de l’angioplastie coronaire jouent un rôle important dans le développement du substrat arythmogène et dans le potentiel de remodelage ventriculaire gauche, deux paramètres qui interviennent directement dans le risque de développer un trouble de rythme ventriculaire et ce indépendamment du délai de l’implantation.

La question qui reste en suspens est celle de l’intérêt de l’implantation précoce d’un DAI chez certains patients considérés à « haut risque » en post angioplastie primaire ?

Le but de l’étude DAPA était ainsi d’évaluer le bénéfice d’un DAI implanté dans les 30 à 60 jours suivant l’angioplastie primaire en termes de survie chez des patients considérés comme étant à haut risque de mort subite.

Le « haut risque » était défini par au moins un des éléments suivants: Survenue d’une fibrillation ventriculaire dans les premières 24 heures d’hospitalisation, fraction d'éjection du VG inférieure à 30%, Killip classe 2 ou plus, flux TIMI inférieur à 3 après l’angioplastie primaire.

 

Lancée en 2004, l’étude DAPA a été menée dans 12 hôpitaux aux Pays-Bas et en Pologne. 700 patients devaient être inclus.

En 2013, avec 9 ans de recul, l'essai a été arrêté après qu’uniquement 266 patients soient randomisés pour recevoir soit un DAI, soit traités de manière médicale. Les défibrillateurs implantés ne pouvaient délivrer que des chocs électriques internes au-dessus de 190 bpm.

En février 2019, les investigateurs ont décidé de procéder à une «analyse de suivi ».

Le critère d’évaluation primaire était la mortalité toutes causes confondues après au moins trois ans de suivi pour chaque patient. Les critères d'évaluation secondaires étaient le décès d’origine cardiaque et la mort subite.

L'implantation du DAI a considérablement réduit le risque de mortalité toutes causes confondues : 24,4% dans le groupe DAI vs 35,5% dans le groupe traitement médical, avec un risque relatif (HR) de 0,58 (IC à 95% ; 0,37-0,91). Le taux de mortalité cardiaque était de 11,4% dans le groupe DAI et de 18,5% dans le groupe témoin (HR 0,52; IC à 95% 0,28-0,99).

Les taux de mort subite n'étaient pas significativement différents entre les groupes.

Il est à noter par ailleurs que malgré une amélioration de la fraction d'éjection dans près de 50% dans les deux groupes, le bénéfice en termes de mortalité du DAI a été préservé.

Fait important à souligner, l'essai datant de près de 16 ans, la programmation des DAI était à l’époque relativement «Archaïque», ne laissant entrevoir aucune donnée sur pourcentage des chocs appropriés et inappropriés.

DAPA suggère une réduction de la mortalité à long terme avec l’implantation précoce d’un défibrillateur chez les patients pris en charge pour un infarctus du myocarde avec sus-décalage de ST à haut risque traités par angioplastie. Il faut toutefois rester prudent dans l’interprétation de ces résultats compte tenu du faible effectif de cet essai.

Est-il temps de revenir aux indications prophylactiques du DAI en post IDM pour des patients dits « A haut risque ».

Il faudra à mon sens avoir plus de preuves solides, recourir à des outils ou scores pour mieux affiner le risque et attendre les résultats du projet Horizon, notamment l’étude PROFID.