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Les 20 ans de la valvulation percutanée de la voie pulmonaire !

DR AJMI HOUDA

Dans une proportion non négligeable de cardiopathie congénitale (tétralogie de Fallot, atrésie pulmonaire à septum ouvert,..), la voie droite représente le problème majeure et nécessite une prise en charge chirurgicale. Celle-ci consiste souvent en une reconstruction de la voie droite en interposant un conduit entre le ventricule droit (VD) et l'artère pulmonaire (AP): tube VD-AP. Cependant, il est actuellement bien connue que quel que soit le type de conduit utilisé, une dégradation de ce dernier va inéluctablement se produire, plus ou moins rapidement entraînant des lésions sténosantes, fuyantes ou mixtes. Il en résulte une dilatation et une altération de la fonction du VD, ainsi que des troubles de rythme sévères et un risque important de mort subite. Les patients étaient alors condamné à plusieurs reprises chirurgicalement pour changement du tube VD-AP, ce qui les exposaient à un taux de mortalité ascendant à chaque reprise chirurgicale. Grace au développement du cathétérisme interventionnel, ces patients peuvent actuellement bénéficier d'une valvulation percutanée de la voie pulmonaire. La mise en place d'un stent valvé a été développé il y a maintenant prés de 20 ans et a permit de remédier à la sténose et à la fuite pulmonaire. La première valvulation de la voie pulmonaire a été effectué en 2000 par Bonhoeffer et al [1] de l'équipe de Necker enfant malades. Depuis, cette technique est devenue un traitement de routine de la dysfonction de la voie droite dans la plupart des centres cardiologiques pédiatriques. Deux dispositifs ont été utilisés dans cette procédure après approbation en USA et en UE: la valve Mélody (Medtronic, Minneapolis, États-Unis) qui est le stent le plus utilisé et disponib

le en 3 tailles (20, 22 et 24-mm), et la valve Edouards Sapien (Edwards, Life sciences, Irvine, Ca), disponible dans 3 tailles (23,26 et 29-mm) [2]. Des études ont été effectué pour évaluer l'amélioration des capacités fonctionnelles, la fonction VD, diminution de la taille du VD ainsi que la qualité de vie après valvulation. Ils ont montré que l'amélioration de ces paramètres chez les patients avec fuite pulmonaire est moins bonne que celle avec sténose. Ces résultats était imputé au retard du timing de la valvulation pulmonaire. Actuellement des recommandations ont été bien établis par l'AHA en 2018 [3] concernant l'indication de la valvulation pulmonaires des Fallot opéré et gardant une fuite pulmonaire et ceci à fin d'optimiser les résultats immédiats et tardifs et d'éviter les complications précoces potentiellement fatales. Ces indications sont:

  • patient avec fuite pulmonaire sévère symptomatique NYHA class II-III
  • patient asymptomatique mais dont l'IRM montrait 2 de ces critères:
  • fraction de régurgitation > 40%
  • volume télédiastolique du VD > 150-160ml/m2
  • FE du VD < 40%
  • pression intra-VD >2/3 systémique
  • QRS > 180msec

Sur le plan technique, le développement de la pratique de cette procédure ont aussi permis d'améliorer ses résultat immédiats. Lors de la procédure, une évaluation du risque de compression coronaire lors du gonflage du ballonet en réalisant simultanément une aortographie sus-sigmoidienne permettait d'éviter certaines complications mortelles. De même, une angiographie de la voie droite effectuée afin de s'assurer de l'absence de rupture de conduits suivi d'un préstenting systématique diminuait de manière significative le risque de fracture de stent. Actuellement, les limites techniques de la valvulation sont essentiellement représentées par une taille de la voie droite native trop large. A fin d'y remédier, plusieurs techniques complexes ont été développées (emprisonnement d'une artère pulmonaire, technique des poupées russes). De même plusieurs prothèses ont été développées pour le même objectif de rendre la valvulation pulmonaire possible chez ces patients. Certaines d'entre-elles ont été récemment aprouvées: « Harmony » et « Venus P », d'autres sont en cours d'essai: valve Pulsta, Myval .... Les réducteurs d'infundibulum ou du tronc pulmonaire ont prouvé leur efficacité chez l'animal mais non encore chez l'homme. D'autres techniques hybrides sont entrain d'être développé tel que le banding (permettant de diminuer le diamètre de la voie pulmonaire) associé à la valvulation en second temps. Grâce à ces progrès, le nombre de patient bénéficiant de cette technique ne cesse d'augmenter.

En dépit de tout ces progrès dans la procédure de valvulation percutanée de la voie pulmonaire, l'endocardite infectieuse demeure à l'heure actuelle la complication majeure la plus redoutable chez les patients bénéficiant de cette procédure. Sa fréquence est estimée entre 2 à 3,9% patients–année [2]. Elle est actuellement la cible de recherche pour en comprendre les mécanismes.

Références:

1. Bonhoeffer P, Boudjemline Y, Saliba Z, Merckx J, Aggoun Y, Bonnet D, et al. Percutaneous replacement of pulmonary valve in a right-ventricle to pulmonary-artery prosthetic conduit with valve dysfunction. Lancet Lond Engl. 2000;356(9239):1403–5.

2. Malekzadeh-Milani S, Boudjemline Y. L’épopée de la valvulation pulmonaire percutanée dans les cardiopathies congénitales. Presse Médicale. 2017;46(6, Part 1):580–5.

3. 2018 AHA/ACC Guideline for the Management of Adults With Congenital Heart Disease: A Report of the American College of Cardiology/American Heart Association Task Force on Clinical Practice Guidelines. Circulation. 2019;139(14):e698-e800.