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La valve mitrale et tricuspide… quoi de neuf ? (Dr Tarek ELLOUZ)

L’étude COAPT à 3 ans :

Introduction et méthodologie:

L’essai COAPT, réalisé aux USA et Canada, a randomisé les patients symptomatiques d’insuffisance cardiaque avec une insuffisance mitrale secondaire en 2 groupes, traitement médical seul versus mitraclip (Abbott).

il a inclus 614 patients. Les résultats du suivi à 2 ans ont été présentés à l’ESC en 2018.

Le suivi a été prolongé à 3 ans et les résultats sont présentés cette année au TCT.

L'ajout d'une année supplémentaire de suivi est particulièrement intéressant, car les patients initialement randomisés pour un traitement médical optimal (OMT) ont été autorisés à passer au MitraClip après le suivi de deux ans.

Résultats:

Malgré un Crossover de 18,6% à MitraClip dans le groupe OMT, les courbes de Kaplan-Meier pour le critère de jugement principal combiné (décès et hospitalisation pour insuffisance cardiaque) pour les  2 groupes ont continué à se séparer à 3 ans, atteignant 88,1% pour le groupe OMT et 58,8% dans le groupe MitraClip (HR 0,48; 95% CI 0,39-0,59, P=0.000001) (figure 1). Le taux de Mortalité toutes causes à 3ans était significativement plus élevé dans les groupe traitement médical seul par rapport au groupe MitraClip ( 55.5% vs 42.8%, P=0.001).

Une analyse d’un sous-groupe portée sur un total de 58 patients du groupe OMT qui sont passés à MitraClip soit avant 24 mois (cinq patients), soit après 24 mois (53 patients). Le taux du critère de jugement principal  combiné  sur les 12 mois après le Crossover n'a été que de 28%, ce qui correspond à peu près au taux observé chez le groupe traité initialement avec le MitraClip à 1 an.

Conclusion:

Selon l’essai nord-américain COAPT, le système de réparation de la valve mitrale MitraClip (Abbott) s'est montré efficace pour réduire la mortalité toutes causes et les hospitalisations pour insuffisance cardiaque chez des patients présentant une insuffisance  mitrale secondaire modérée à sévère ou sévère, un bénéfice confirmé à 2 ans et qui se maintient à 3 ans. Les patients initialement traités médicalement bénéficient de l’avantage de cette technique quand ils passent au groupe Mitraclip.

Figure 1 : l’Essai COAPT : Critère primaire de jugement à 3 ans :

1-year outcomes of mitral valve-in-valve using the Sapien 3 aortic transcatheter heart valve: data from the STS/ACC/TVT Registry

Résultats à un an des interventions mitrales valve-in-valve utilisant la prothèse Sapien 3 en position mitrale : données à partir du registre STS/ACC/TVT :

Introduction et méthodologie:

La chirurgie de remplacement mitral rédux sur des bio prothèses dégénérées est grevé d’une mortalité importante, dépassant les 11% selon les données du registre STS.

Les interventions d’implantation de valve-in-valve mitrale par transcathéter est une alternative moins invasive chez ses patients à haut risque.

Pour évaluer cette technique, les investigateurs ont enrôlé à partir du registre TVT, 1576 patients ayant bénéficié d’une implantation mitrale valve-in-valve utilisant la prothèse TAVI Sapien 3 (Edwards Lifesciences), entre juin 2015 et août 2019. Une comparaison entre les résultats des deux approches trans-apicale et trans-septale a été présentée au TCT.

Résultats:

La plupart des procédures (84,1%) ont été réalisées avec un accès trans-septal. Le score STS moyen était à 11 dans le bras trans-septal et 11,7 dans le bras  trans-apical. les caractéristiques cliniques de base étaient similaires dans les deux groupes. Les principales indications étaient une sténose mitrale (54%) une insuffisance mitrale (23%) et l’association de ces deux pathologies (23%).

Le temps de scopie était significativement plus long dans le bras trans-septal (18.2 vs 37 minutes; < 0.001), mais sans différence concernant la durée de la procédure, la taille des valves, l’embolisation du dispositif et la perforation cardiaque.

Le taux de mortalité intra-hospitalière toutes causes était significativement plus bas dans le bras trans-septal versus le bras trans-apical ( 3.6% vs 6.4%, p=0,05), ainsi le séjour hospitalier médian était plus court dans le bras trans-apical ( 2 vs 6 jours, P<0.0001).

Le critère principal de sécurité incluant le taux de succès de la procèdure  était similaire entre les 2 groupes (trans-apical 97,13% vs  trans-septal 94,58%; P = NS), mais l'accès trans-septal montrait un net avantage pour le critère principal de l'efficacité : mortalité toutes causes à 1 an  (15,8% vs 21,7%; HR 0,67; IC 95% 0,47-0,97, P=0.03) (figure 2).

Il n’y avait pas de différences pour les autres critères : accident vasculaire cérébral, réintervention de la valve mitrale, implantation d’un nouveau pace maker, fuite mitrale péri-procédurale ou complications vasculaires majeures.

Conclusion:

L’implantation valve-in-valve mitrale par transcathéter  particulièrement par accès trans-apical est préférable à une intervention chirurgicale mitrale rédux

et elle devrait une indication de choix pour les patients porteurs d ‘une bioprothèse dégénérée avec une anatomie favorable.

Figure 2 : Implantation valve-in-valve mitrale par la Sapien 3 : Critères de jugement à 12 mois :

Mitral Valve Surgery Institutional Volume-Outcome Relationship in the United States: A partir du registre STS :

Introduction et méthodologie:

Cette étude a comme objectif d’évaluer le volume et les résultats de la chirurgie mitrale par remplacement ou plastie valvulaire aux États Unis, ainsi de définir la relation volume-résultat de cette chirurgie au niveau hospitalier et  chirurgien.

Les investigateurs ont examiné les données de la base de données de chirurgie cardiaque chez l'adulte de la « Society of Thoracic Surgeons ». Leur analyse a porté sur 55 311 patients présentant une IM primaire ayant subi une plastie ou un remplacement isolé de la valve mitrale dans 1 094 hôpitaux américains. Les résultats sur un an ont été évalués par le biais d'un couplage avec les données des centres « Medicare & Medicaid Services » (CMS).

Résultats :

Le volume de procédure annuel médian était de 23 au niveau hospitalier et 12 au niveau des chirurgiens. Les hôpitaux du quartile inférieur en volume effectuaient moins de 11 opérations par an, tandis que ceux du quartile supérieur en réalisaient plus de 46. Les chiffres pour les chirurgiens étaient environ la moitié de ceux des hôpitaux.

Globalement, le taux de plastie mitrale était élevé à 81%, mais il y avait des différences significatives en fonction du volume des hôpitaux. Le taux de plastie était de 63,8% pour le volume le plus faible et de 84,5% pour les centres dont le volume était le plus élevé (P <0,0001).

Le résultat primaire dans cette étude est la mortalité opératoire de la chirurgie. Et cela était inversement liée au volume des procédures à la fois à l’hôpital et au niveau du chirurgien. En effet la mortalité opératoire dédouble de 0,70% à 1.42% du groupe des chirurgiens au volume le plus élevé au groupe des chirurgiens au volume faible (P <0.0001).

La même tendance a été observée pour les résultats secondaires de morbi-mortalité à 30 jours (hémorragie, accidents vasculaires cérébraux, réanimation prolongée, insuffisance rénale et infection de la plaie) et de mortalité à un an.

Conclusion :

Le volume annuel des interventions chirurgicales mitrales, pour le traitement des insuffisances mitrales primaires, par  chirurgien ou par hôpital  est inversement proportionnel au taux de réussite de la plastie mitrale, à la mortalité opératoire et à la morbi-mortalité à un an.

Ces résultats sont intéressants pour les autorités de santé pour définir l’accès aux centres chirurgicaux selon la complexité de la maladie mitrale.

Transcatheter versus medical treatment of symptomatic severe tricuspid regurgitation: a propensity score matched analysis: TriValve Registry

Introduction et méthodologie:

Pour évaluer le bénéfice des interventions percutanées par transcathéter sur la valve tricuspide chez les patients avec une insuffisance tricuspidienne sévère, les investigateurs ont consulté le registre TriValve, incluant des patients traités dans 22 centres en Europe et en Amérique du Nord.

La population totale  du registre comprenait 472 patients ayant eu une intervention sur la valve tricuspide par un transcathéter et 1 179 patients sous traitement médical seul, l’analyse appariée en fonction de l'âge, du risque chirurgical et de la pression artérielle pulmonaire systolique, a finalement porté sur 268 patients dans le groupe intervention tricuspide percutanée, qui a été comparé à un groupe control (n=268) dont les caractéristiques cliniques étaient similaires.

Le critère de jugement primaire était la mortalité toutes causes ou la ré-hospitalisation pour insuffisance cardiaque à 12 mois. Alors que le critère secondaire était la mortalité toutes causes à 12 mois.

Résultats:

L’analyse appariée, présentée au TCT 2019 et publiée simultanément dans le Journal de l'American College of Cardiology, a montré que le taux de survie sans ré-hospitalisation pour insuffisance cardiaque à 12 mois (critère primaire combiné) est de 51,3% chez les patients sous traitement médical seul et de 68,4% parmi ceux traités avec une option d’intervention tricuspide par transcathéter (P = 0,0003). La même différence significatives entre les deux groupes a été retrouvé pour la mortalité totale à 12 mois en faveur du groupe interventionnel ( le taux de survie : 77,3% vs 64,4%, P =0.0009) (figure 3). 

Plusieurs types de dispositif ont été essayé dont le plus important est le système MitraClip (Abbott Vascular)  utilisé chez environ 80% des patients.

Le taux de succès de la procédure a été à 85% dans chez les 268 patients inclus.

Il a été observé des meilleurs résultats cliniques chez les patients ayant subi une intervention tricuspide réussie (définie comme une IT résiduelle inférieure à grade 3 et une récupération du dispositif réussie).

Conclusion:

En l’absence de données d’essai randomisé, l’analyse appariée du registre TriValve suggère un intérét des interventions par Transcathéter des insuffisances tricuspidiennes sévères dans la réduction des taux de décès et d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque à un an.

Figure 3 : Intervention tricuspidienne percutanée : Critères primaire et secondaire